Résumé
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L'essentiel à retenir

Quels besoins le travail comble-t-il ? Comment y réinjecter du sens dans un contexte si particulier ? Comment y croire de nouveau si on se trouve dans une impasse ? Comment répondre à ses incertitudes ? Par où commencer pour aborder son épanouissement professionnel en accord avec ses besoins personnels ?

Nous avions la joie d’en parler avec Alexandre Huet, dont la double casquette de coach partenaire Chance et d'ancien chercheur en sciences politiques était particulièrement éclairante.

Qu’est-ce qu’une crise de sens ?

D’abord, rappelle Alexandre Huet, le sens n’a pas le même sens ni la même valeur pour chacun d’entre nous. Il est dès lors intéressant d’explorer les mots qui sont associés à la crise de sens : désorientation, démotivation, sentiment d’inutilité et d’inertie, le tout dans un univers de plus en plus illisible qui rend la capacité à se forger une conviction ou un avis de plus en plus difficile.

Tout ça suscite une difficulté forte à se projeter dans le futur, et à analyser correctement d’où vient l’inconfort de notre situation professionnelle et personnelle.

Ce qu’il y a de particulier dans la situation actuelle, souligne Alexandre Huet, est la combinaison d’événements et de crises que nous traversons. Edgar Morin parle à ce sujet de “crise anthropologique”, c’est-à-dire une crise qui combine des types de crises différents, que d’autres appellent “permacrise” (crise permanente), et qui exige sans cesse de nouveaux modes d’adaptation (le confinement, les couvre-feux, en sont des exemples éloquents).

Comment cette crise s’est-elle répercutée sur notre rapport au travail ?

Aujourd’hui, le rapport au travail a changé, et se trouve pris dans des notions de valeurs, et dans ce que dit le travail de ce que nous sommes socialement, par rapport à ce que nous apportons au monde.

Le rapport au travail a énormément évolué à travers les âges, note Alexandre Huet. Avant, la question “Pourquoi je travaille” obtenait une réponse plutôt simple : le travail permettait de subsister, et la fonction qu’on remplissait comblait un besoin plus direct de la société (notaire, boulanger, etc.). La dimension sociale existait aussi, mais selon des typologies plus traditionnelles qui n’étaient pas liées à une idée de la “réussite” individuelle : un rentier était un bourgeois ou un noble, par exemple, mais on était relativement peu dans l’imaginaire du “self-made man”.

Aujourd’hui, le rapport au travail a changé, et se trouve pris dans des notions de valeurs, et dans ce que dit le travail de ce que nous sommes socialement, par rapport à ce que nous apportons au monde : “C’est un thème qui s’invite très souvent chez les talents (les utilisateurs) Chance, explique Alexandre : ‘Quelle est votre représentation du travail ou de la réussite.’ Or cette question n’est pas du tout simple.”

Très souvent, mes coachés me disent que si dans un dîner on leur demande ‘Tu fais quoi dans la vie’, ils veulent se cacher sous la table. Et cela s’explique notamment par le fait que la question ‘Tu fais quoi’ se soit substituée à celle de ‘Qui es-tu ?’.

À ce titre, ce qui s’est produit lors du premier confinement était parlant : l’espace de ce moment très marquant, la “réussite économique” a été renversée en plaçant le caractère “essentiel” des fonctions professionnelles au premier plan. C’est à cette période que la notion (pas neuve) de “bullshit job” (jobs à la con) est revenue aussi au goût du jour.

La conséquence, Alexandre la constate dans ses accompagnements Chance : “Très souvent, mes coachés me disent que si dans un dîner on leur demande ‘Tu fais quoi dans la vie’, ils veulent se cacher sous la table. Et cela s’explique notamment par le fait que la question ‘Tu fais quoi’ se soit substituée à celle de ‘Qui es-tu ?’.”

Le contexte (toujours lui) n’y est pas pour rien : en plus des informations alarmantes constantes sur l’état du monde, on n’a jamais autant parlé des sujets (essentiels) du burnout, de la quête de sens, de la charge mentale, créant aussi un besoin de sens et d’harmonie, mais au prix d’étapes complexes à appréhender. Le juriste et psychanalyste Pierre Legendre dit que “l’homme moderne vit au-dessus de ses moyens psychiques” : en effet, comment déterminer nos fondamentaux, alors que nous sommes assaillis d’informations de toutes sortes ?

Et puis, indique Alexandre Huet, nous sommes dans un phénomène d’“accélération”, qu’abordent les philosophes et sociologues Paul Virilio et Hartmut Rosa : nous sommes bombardés d’informations, nous en sommes les émetteurs, les récepteurs, les commentateurs via ce qu’apportent les nouvelles technologies, et cela a un effet majeur sur nous.

Enfin, une autre conséquence de ces crises est l’incertitude : “Ce qui a créé un stress extrême, c’était l’incertitude de ce qui allait se passer.” Comment, quand on ne sait pas de quoi sera fait demain, se projeter dans un avenir clair ? Revenir à des considérations quotidiennes, proches, peut aider.

Que comble réellement notre travail ?

“Si on essaie d’analyser ce que recouvre la valeur de l’impact au travail pour chacun-e d’entre nous, une fois de plus la réponse est impossible puisque nous sommes toutes et tous différent-es”, rappelle Alexandre.

Il convient donc de regarder cette question au travers de grilles d’analyse.

5 besoins que comble le travail

Le travail aujourd’hui peut combler plusieurs besoins, qui correspondent à des priorités pas nécessairement cumulatives.

  1. La transformation : la question d’un impact qui viserait à “transformer le monde de demain” est, elle aussi, plutôt récente : il y a encore 15, 20 ans, elle était bien moins centrale et le travail avait comme objectif quasi unique de nous permettre de consommer, d’être dans une forme de confort économique et social.
  2. L’impact : le travail est un moyen d’avoir une utilité sociale.
  3. L’ascension ou l’ambition : le travail est aussi un moyen de progresser économiquement, socialement, professionnellement
  4. L’introspection : le travail peut être appréhendé comme un moyen d’épanouissement personnel.
  5. L’équilibre : le travail peut enfin être pensé comme moyen de gagner sa vie. Une autre facette de ce qu’on peut rechercher à travers le travail.

Le sens au travail peut aussi provenir d’une dynamique d’équipe positive

Le projet Aristote, mené par Google en 2012, visait à comprendre ce qui créait des dynamiques positives au sein d’équipes de travail. Il en est ressorti 5 points clés :

  1. La sécurité psychologique : le fait d’être à l’aise vis-à-vis de l’organisation, du management, et de ses collègues. Cette aisance sur ces 3 dimensions assure une capacité à s’exprimer sans peur d’être remis à sa place par les uns et les autres.
  2. La co-dépendance : pouvoir compter les un-es sur les autres, être dans un soutien d’équipe mutuel, dans une logique collaborative.
  3. La clarté de la structure et des objectifs : les objectifs et les moyens pour les atteindre sont-ils définis, clarifiés ? Ce point rejoint une question récurrente chez les talents de Chance quant à leur rôle (ou leur place) au sein de leur organisation.
  4. Le sens : le travail produit vise-t-il quelque chose d’important pour chacun d’entre nous ?
  5. L’impact : croyons-nous profondément que notre travail compte à une échelle plus haute ?

Comment alors réinjecter du sens dans notre travail ?

Se réancrer dans la confiance en nous, en nos atouts et en notre faculté d’adaptation

La première chose, constate Alexandre, est que les personnes qui font le parcours arrivent en ayant le plus grand mal à valoriser ou même à identifier leurs compétences. C’est sans doute lié aux nouvelles modalités de travail, qui amènent moins de lien et donc d’occasions d’échanger sur ce qu’on fait, d’obtenir une reconnaissance verbalisée de la qualité de notre travail, et donc d’identifier nos forces. Et la reconnaissance (d’autrui vers soi, mais aussi de soi à soi) produit le sens, qui lui-même nourrit la valorisation de ce qu’on sait faire (puisqu’on sait pourquoi on le fait).  

Cela rejoint évidemment l’enjeu de la confiance en soi, mais aussi d’une capacité à se projeter : rappelons qu’une compétence est toujours transposable (ce qui pose d’ailleurs la question du terme “reconversion” qui suggère en creux une rupture).

Ce travail sur la perception de soi peut aussi changer le rapport à son environnement de travail, et permettre de s’y réinvestir.

Se mettre en position de spectateur-rice pendant son introspection

Appréhender les crises comme des moments de renforcements et de transformation plutôt que de désastre. Nassim Nicholas-Taleb

L’introspection est un moment dont on peut profiter pour explorer l’impact sur soi du changement, que ce dernier soit le nôtre ou celui que traverse le monde. On peut alors se poser différentes questions :

  • Que m’inspire ce que j’ai vécu depuis deux ans (en termes d’émotions, réactions, besoins) ?
  • Quel lien puis-je faire avec d’autres changements que j’ai vécus ?
  • Qu’est-ce que cela m’apprend sur moi ? Où suis-je très adaptable, et où le suis-je bien moins ?
  • Qu’ai-je observé chez les autres ?
  • Qu’est-ce que j’en apprends ?
  • Que peut-on tirer comme enseignement de cette crise en matière en gestion de soi ? (par exemple : accepter la perception des autres, leurs réactions parfois différentes, accepter l’imperfection de son environnement).

Nassim Nicholas-Taleb a notamment théorisé la puissance de l’imprévisible à travers l’image du cygne noir, et a développé la notion de l’“antifragilité” où il préconisait d’appréhender les crises comme des moments de renforcements et de transformation plutôt que de désastre.

Chercher et obtenir le soutien de son entourage

Une étude de Harvard, la plus longue jamais produite (70 ans), cherchait à comprendre les clés de l’épanouissement personnel et du bonheur à long terme. Et ce qu’elle montrait était que c’était le tissage, la création et le maintien à long terme de relations interpersonnelles très fortes qui constituaient les facteurs principaux du bonheur. Robert Waldinger en parle dans ce TedX :

Revenir au temps long de l’introspection et ralentir pour retrouver du sens

Ralentir permet de retrouver une capacité de décision et de plaisir.

Le niveau d’anxiété lié aux crises est amplement lié à l’instantanéité et à cette fameuse accélération évoquée en début d’article : on note dans différentes études, notamment une réalisée en Chine en mars 2020 (BMJ), que les catégories 18-30 ans étaient celles où les scores de détresse psychologique étaient les plus importants. Pour cette catégorie, outre l’incertitude, l’isolement liée au confinement et l’instabilité financière, l’exposition forte aux réseaux sociaux et à de nombreux flux d’information était un facteur majeur.

Le fait de ralentir permet l’introspection (une phase clé du parcours Chance) et finalement, une forme de soin de soi (pendant le confinement, n’avons-nous pas été nombreux et nombreuses à faire du pain et du yoga, des activités lentes demandant un temps long, pour nous mettre, l'espace de quelques instants, à l’écart de la crise en cours ?). Cela augmente nos capacités d’attention, de compréhension de notre environnement et de l’impact qu’il a sur nous. In fine, ralentir permet de retrouver une capacité de décision : les Taoistes parlent de “vide fertile”, et un proverbe japonais dit : “Si tu es pressé, fais un détour”.

Le plaisir alors peut réémerger : qu’est-ce qui nous fait plaisir ? Qu’est-ce qui nous rend profondément heureux et arrête le temps ? Ce sont là les points clés qu’il s’agit d’explorer pour trouver le sens au travail qu’on occupe ou à un projet de réorientation professionnelle, et une fois de plus le temps long agit comme un révélateur.

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