L'essentiel à retenir
Beaucoup de nouveaux termes dans ce titre pour désigner quelque chose qui n’est sans doute pas si neuf que ça : déjà en 2015, une étude menée par le Salon des micro-entreprises montrait que 4,5 millions de Françaises et Français (soit 16% des actifs quand même) sont des slasheurs. Un chiffre que nous retrouvons chez Chance, où en fin de parcours 14% de nos talents ont pour projet de s’épanouir dans plusieurs types de travails différents. Chrystelle Henry, coach partenaire Chance, nous a fait le plaisir de venir nous en parler lors d’un live exceptionnel.
D’abord, qu’est-ce que le slashing ?
Le slashing désigne le fait de cumuler plusieurs activités en même temps, ces activités n’étant pas forcément liées entre elles. Le slashing est un mode de travail qui prend deux formes :
Le slashing choisi
De manière assez claire, le slashing choisi est lié à un nouveau rapport au travail, où la liberté, la flexibilité et une forme de créativité (visant à convertir un talent ou une passion en activité professionnelle), sont de plus en plus désirables par rapport à la sécurité et à la fidélité à une carrière linéaire.
Le slashing subi
Le slashing subi amène des individus à devoir cumuler des emplois (un emploi de jour et un emploi de nuit) pour arriver à une forme d’équilibre économique. Ce slashing subi est aussi lié à un appauvrissement, une hausse du coût de la vie, à une précarisation. C’est le signe aussi d’une réalité du monde très inégalitaire.
Comment détermine-t-on que le slashing est un modèle qui nous convient ?
Avec l’accompagnement, on peut s’apercevoir que pour un individu, une activité salariée + une activité de freelance et une autre activité créative peut constituer la clé de l’épanouissement professionnel et personnel.
“Les slasheur-ses et multipotentiel-les sont des créatif-ves dans un monde de cases.”
Le slashing est enfin valorisé, de même que le fait de se déployer en tant que multipotentiel-le : ““Les slasheur-ses et multipotentiel-les sont des créatif-ves dans un monde de cases”, indique Chrystelle Henry, et il est de plus en plus respecté de “sortir des cases”, ce qui constitue une opportunité claire pour assumer ce choix de vie.
Sortir du slashing : l’autre défi
Parce que c’est bien beau tout ça, mais il peut advenir que l’on veuille retrouver une stabilité après une période de slashing. Or il n’est pas nécessairement simple de savoir vers où aller ni de pouvoir, au moment de postuler, valoriser une vie professionnelle très variée, moins linéaire ou rassurante qu’une expérience à un poste fixe. “Il est essentiel, dans ce genre de cas, d’être accompagné-e pour trouver la ligne qui donne sa cohérence à son parcours et le rendre désirable”, explique Chrystelle Henry.
C’est quoi, être multipotentiel-le ?
Le terme “multipotentiel” est issu de la psychologie et des neurosciences et est apparu dans les années 1970, indique Chrystelle Henry. Il induit “un câblage particulier du cerveau”, qui amène ce dernier à fonctionner en arborescence, donc à passer d’une idée à une autre (comme un réseau Internet) et ainsi, à “produire une vision globale d’une situation ou d’une problématique”.
Les multipotentiel-les : des profils généralistes plutôt qu’experts
Quoi qu’il en soit, ce qui ressort le plus souvent chez les personnalités de ce type, c’est qu’elles donnent l’impression de se disperser facilement, et sont donc plutôt des profils généralistes, sans désir d’entrer dans une expertise en particulier.
Or “le monde a besoin des généralistes” : un monde d’expert-es n’est pas désirable. Il faut bien des médecins généralistes pour appréhender le fonctionnement global de notre corps, et c’est pareil dans la société en général.
Les multipotentiel-les sont capables de s’adapter et d’innover pour trouver des solutions : au travail, les multipotentiel-les peuvent se déployer et énormément apporter à leur structure, avec leurs aptitudes à résoudre les problèmes et proposer une vision plus large.
Comment sait-on qu’on est multipotentiel-le ? Quelles difficultés sont associées à ce profil et comment les surmonter pour dégager - justement - son plein potentiel ?
Breaking news : nous sommes tous multipotentiel-les, annonce Chrystelle. Contrairement aux HPI (hauts potentiels) ou à l’hypersensibilité, la multipotentialité est plus universelle.
“Le monde demande aux gens d’adopter une voie, de savoir très jeunes ce qu’ils veulent faire plus tard, ce qui est en réalité très antinaturel. Chaque potentiel de chaque être humain est appauvri par ce que la culture de la voie unique suscite.”
Certaines personnes, à la manière des hauts potentiels, ont un mode de pensée par arborescence mais, dit Chrystelle Henry, “la multipotentialité, ce n’est pas que ça : chaque personne est un arc-en-ciel de couleurs qui a été forcée dans une case”. “Le monde demande aux gens d’adopter une voie, de savoir très jeunes ce qu’ils veulent faire plus tard, ce qui est en réalité très antinaturel”, ajoute-t-elle, “Chaque potentiel de chaque être humain est appauvri par ce que la culture de la voie unique suscite.”
Les multipotentiel-les seraient donc peut-être des sortes de résistant-es à la culture des cases ? Chrystelle Henry soutient que oui : “Les multipotentiel-les ont gardé leur liberté d’enfants, et s’autorisent plus que les autres à vivre cette capacité à produire une pensée et un regard libres sur le monde.”
Enfin, une personne multipotentielle a une très forte rapidité d’apprentissage et a donc tendance à s’ennuyer dans un environnement peu stimulant (et là, on peut imaginer que la collection de lieux de travail qui va avec le slashing puisse être un bon antidote).
Est-il idéal d’être multipotentiel-le pour slasher ?
Eh bien pas forcément : ha !
Une personne multipotentielle peut avoir plein de passions et d’intérêts, ce n’est pas pour autant qu’elle va s’épanouir dans le slashing : un-e multipotentiel-le aura une manière différente de travailler au sein de l’entreprise, sans nécessairement vouloir s’extraire d’une dynamique d’équipe et de cette stabilité, rappelle Chrystelle Henry. Et de la même manière, une personne qui slashe n’a pas forcément les caractéristiques d’un-e multipotentiel-le et peut tout à fait s’épanouir dans le slashing ainsi.
Tout n’est, toujours, qu’une question de personnes : être multipotentiel-le n’est ni une case dans laquelle on serait enfermé-e, ni une maladie, c’est une manière de fonctionner et réfléchir qui ne détermine pas l’ensemble de ses besoins et de ses traits de personnalité.
Le slashing : un défi pour les multipotentiel-les
Contrairement aux apparences, pour slasher, il faut au contraire déployer énormément d’énergie en organisation. Et si le slashing constitue un potentiel eldorado pour un-e multipotentiel-le, c’est aussi un grand défi : “Cela demande une routine extrêmement précise, cela exige de savoir exactement où on met son énergie, comment on la canalise.”
L’autre défi, pour les personnes multipotentielles, est de parvenir à se valoriser : dans la mesure où ils ont l’impression de ne pas avoir d’expertise et de vite s’ennuyer, il leur est difficile de s’apercevoir de leurs forces, de ce qu’ils apportent à une structure, que ce soit en tant qu’employés ou à leur compte. Or le slashing exige aussi de savoir donner une valeur tarifaire ou salariale à ses services.
Et comme les personnes multipotentielles fonctionnent au fait de lancer des choses plutôt que de les accompagner dans la durée, l’idéal est de créer un projet professionnel ayant un socle de base suffisant pour subsister à leurs besoins matériels et de stabilité en général, à côté duquel ils peuvent continuer d’expérimenter et de s’épanouir dans des modalités stimulantes.